Congrès 2016 Discours de David Cormand, secrétaire national
Écologie Les Verts – Congrès 2016 Discours de David Cormand, secrétaire national
Je monte à cette tribune avec beaucoup d’émotion. Et en ayant conscience de la dureté des temps.
L’émotion, c’est celle d’un militant de l’écologie auquel vous venez de con er une lourde responsabilité, mais une belle responsabilité, celle d’être l’animateur de notre mouvement. La dureté des temps, dont je parle, c’est celle dune période qui a vu notre mouvement s’affaiblir, notre parti se diviser, notre image se ternir et notre amme vaciller.
EELV va mal. Et quand EELV va mal, c’est toute l’écologie qui s’en trouve affaiblie. Nous avions construit notre mouvement pour être la solution à la crise politique du pays, et nous sommes devenus une partie du problème. Nous n’avons pas été à la hauteur de nous mêmes. Nous n’avons pas suf samment répondu présent à l’appel de l’alternative. Nous avons porté l’espoir au tombeau. Nous avons déçu et donné le pitoyable spectacle de notre décrépitude en pâture à nos nombreux adversaires.
Notre état actuel ne doit pas nous réjouir, mais il ne doit pas doit pas davantage nous conduire à l’immobilisme. Vous savez, quand tout va mal, on a parfois un ré exe conservateur. On veut parfois se raccrocher à l’illusion d’un âge d’or passé qui constituerait la référence de notre action présente. Je pense que nous aurions tort. Notre mission c’est de xer un cap pour l’avenir, un cap différent du national populisme, du libéralisme échevelé ou du culte du productivisme .
D’ailleurs, je regrette que notre congrès n’ai pas assez abordé ces enjeux de fond. Mais il était un temps nécessaire de catharsis. Disons nous les choses franchement. Quelle que soit la motion que nous avons défendu, nous en avions gros sur la patate. Il faut dire que rien ne nous a été épargné ces derniers mois : ni les coups bas, ni les vilénies, ni les trahisons. Et comme le peuple vert est pagailleur, nous ne nous sommes pas, en plus épargné les divisions.
Notre congrès a été âpre. Rude. Et parfois violent. C’est qu’il y a, pour expliquer notre présente situation, un long cortège de responsabilités à énumérer. Je ne veux ici, parler que des miennes. Oui j’ai fait partie des directions précédentes, avec leur part de succès et leur part d’échec, avec leur part de lumière et leur part d’ombre. Mais à celles et ceux qui craignent que le mandat qui s’ouvre soit celui de la
continuité je veux le dire sans hésitation : je suis la pour tout changer. Et je ne peux le faire qu’avec l’aide et le soutien de chacune et chacun d’entre vous.
Je ne vais pas faire le malin, et faire semblant de croire que je suis le nouveau leader de ce parti. Je sais quel concours de circonstance m’a mis en situation de devenir secrétaire national. Mais je connais aussi ma responsabilité, et l’honneur que représente cette charge, que je reçois comme une distinction.
A cet instant, je veux remercier celles et ceux qui m’ont apporté leur con ance. Je veux aussi dire une seule chose à celles et ceux qui doutent de ma volonté de transformation des pratiques : je ne suis d’aucune faction, et je les combattrai toutes. Il n’y aura ni clique ni claque, ni bande, ni contrebande, ni côterie, ni fan club ni rme. Je demande à chacun de comprendre que ce parti n’est la propriété de personne parce qu’il appartient uniquement à celles et ceux qui ont besoin que se lève une force écologiste libre et déterminée à changer la donne politique du pays.
C’est en nous même qu’il nous faut trouver la force du sursaut. J’ai entendu le message du congrès : la continuité n’est pas possible.
La première étape de sursaut c’est de changer nos pratiques internes, et notamment de reconstruire de la con ance entre nous. J’ai donc souhaité que la nouvelle direction du parti soit collégiale, pour garantir que chacun prenne sa place dans l’animation de la vie d’EELV.
Le sursaut c’est aussi apprendre à écouter les voix discordantes, même quand ce qu’elles ont à dire nous bouscule. J’ai pris ces dernières semaines une leçon de courage politique, quand des femmes de notre parti, qui avaient été victimes d’agissements insupportables ont trouvé la force de nous alerter et de secouer les chaines de notre inertie.
Ces femmes elles s’appellent, Elen Debost, Sandrine Rousseau, Annie Lahmer et j’y associe bien sûr notre amie Isabelle Attard. Je vous demande de les applaudir.
Parce qu’elles ont parlé pour elles, mais aussi pour nous, pour nous rappeler que la question du droit des femmes est un combat jamais achevé. En dénonçant le pire, elles ont fait appel au meilleur qui sommeille en nous. Elles ont réveillé nos consciences endormies. Merci à elle, mille fois merci, et qu’elles sachent que nous sommes à leur côtés. Je leur dis, tenez bon.
Notre mouvement , EELV, c’est donc celui de ces femmes admirables.
C’est aussi celui de José Bové le militant infatigable d’une autre agriculture et d’une autre mondialisation, qui n’hésita pas à démonter les McDo et à faucher des OGM pour ouvrir une voie nouvelle. Notre parti c’est celui de Noël Mamère, le défenseur des droits de l’homme qui a changé l’histoire de ce pays en mariant deux hommes dans sa mairie de Bègles, ouvrant ainsi la voie au mariage pour tous. Notre mouvement c’est celui de la courageuse Eva Joly qui a vécu une partie de sa vie avec des gardes du corps parce qu’elle combattait la corruption des puissants et qui fut notre courageuse candidate à la présidentielle et qui aujourd’hui soutient les lanceurs d’alerte comme Snowden et Assange dans leur combat pour la transparence. Notre mouvement c’est celui de Yannick Jadot qui fut mis sur écoutes par EDF en raison de son engagement en faveur de la sortie du nucléaire, c’est désormais aussi celui de la génération Delli/Bayou qui ne cesse de réinventer l’action politique pour y faire entrer le souf e de la vie. Notre mouvement c’est celui de celles et ceux qui inventent aujourd’hui la société de demain en tenant tête aux puissants qui ne veulent rien changer.
Alors vraiment il y a de quoi être er, de quoi redresser la tête, de quoi retrouver le chemin de l’unité pour repartir à la conquête de la majorité culturelle pour transformer notre pays et faire face aux grandes menaces que nous devons affronter.
Pouvons-nous rester divisés alors que le climat déréglé nous oblige d’agir de concert, puisque nous sommes les seuls en vérité à comprendre l’urgence de changer de modèle? Pouvons nous rester inaudibles alors que la transition énergétique est en berne et que le budget du ministère de l’écologie est en baisse ?
Pouvons nous persister dans de vieilles querelles alors que l’entée dans l’anthropocène demande que nous prenions la tête du camp des progressistes pour inventer la grande force politique du 21e siècle ?
Trois fois non. Nous devons nous rassembler pour rassembler au delà de nos rangs. Je veux que les françaises et les français puissent compter sur nous pour, en défendant l’écologie, défendre leur vie quotidienne, leur santé, leur emploi, leur avenir .
Regardez ce qui s’est passé en Autriche. C’est un écologiste qui a su faire barrage à l’extrême droite. Partout en Europe, le parti de la haine augmente, se nourissant de la crise sociale et des angoisses identitaires.
Nous, écologistes français avons la responsabilité de nous battre pour une autre Europe sans céder ni aux nationalistes, ni aux béni oui-oui du libéralisme. Nous écologistes français avons la responsabilité ici en France de faire exister une troisième voie entre la gauche sociale démocrate épuisée et l’opposition de gauche protestataire.
Ce sera d’ailleurs l’un des enjeux de la présidentielle. Nous aurons l’occasion d’en reparler. Je le dis tranquillement, aux apprentis sorciers qui rêvent de faire taire l’écologie, rien n’arrête une idée dont l’heure est venue. Ni les menaces, ni les magouilles, ni même l’achat de certains de nos responsables ne seront suf sants pour nous faire reculer. Pour nous représenter, plusieurs candidates et candidats se préparent. Fort bien. La présidentielle n’est pas à prendre à la légère. Je leur demande de s’entendre, et au nal de s’unir pour que leur voix porte. Ensemble nous sommes plus forts.
Les écologistes sont de retour. Notre congrès n’est pas une ligne d’arrivée, mais un point de départ. Il nous reste bien du travail mais soyez certains que le changement est lancé.
Dans les semaines qui viennent nous serons à Notre-Dame des Landes pour nous opposer à un projet absurde mais aussi pour promouvoir une autre conception de l’aménagement du territoire.
Nous sommes aux côtés des opposants à la funeste loi El Khomri, non pas seulement pour résister mais aussi pour promouvoir un nouveau modèle. Oui EELV défend le revenu de base, la réduction du temps de travail et le plafonnement du salaire des grands patrons parce que les écologistes sont des défenseurs de la justice sociale.
Nous défendrons aussi la sixième République, avec la proportionnelle, le droit de vote des résidents étrangers, l’inversion du calendrier pour redonner le primat aux législatives, et la suppression du 49-3 dont on voit bien l’usage anti-démocratique qui en est fait par un gouvernement aux abois.
La singularité des écologistes est que nous sommes les seuls à défendre le droit des générations futures. Alors soyons dignes d’elles. Retroussons nos manches et rejetons nos divisions. Relevons la tête et remettons nous en mouvement. Refaisons du vert la couleur de l’espérance.